Tunisia Investment Forum : un enthousiasme participatif

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Organisé par la FIPA, Le Tunisia Investment Forum a mis en scène de très nombreux acteurs du développement et de la croissance dans différents secteurs d’activité. Il a aussi mobilisé de nombreux ministres comme au cours de ce second panel ouvert par la Ministre de L’Industrie, des Mines et de l’Energie, Mme Neila Nouira Gongi. Extraits de la conférence.

De manière très informelle, Madame la Ministre a ouvert sa présentation en félicitant en tant que « maman et tunisienne » aussi bien les mamans que leurs enfants qui ont eu le BAC hier » (en juillet dernier, ndlr). Une phrase loin d’être anodine si l’on se réfère aux débats qui ont suivi et à la volonté de ce même ministère de miser sur l’apprentissage des jeunes, à la formation universitaire et professionnelle, rappelant que la Tunisie était un creuset de talents, qu’il fallait continuer d’alimenter. Et la notion d’investissement apparaissait aussi sous le jour d’un futur à dessiner pour les jeunes d’aujourd’hui, un futur qu’il ne faut pas appauvrir. Madame la Ministre a continué, en effet, son discours en mettant l’accent sur la nécessité du pays d’établir « un partenariat gagnant gagnant avec les entreprises internationales. Depuis 50 ans et les lois de 72, la Tunisie s’est mise sur le chemin de l’ouverture et de l’investissement. Le TIF a 20 ans, nous pouvons faire de la rétrospective ou de la prospective. Au quotidien, partons d’une prospective que nous voulons gagnante gagnante pour tout le monde. Et nous devons placer l’innovation au au centre de notre quotidien pour prendre place dans la compétition, tant dans les secteurs les plus traditionnels que les plus technologiques ». La Ministre a évoqué également la nécessité et la volonté du gouvernement de développer les infrastructures de transport et technologiques à même de fournir aux entreprises ce qui leur est nécessaire pour se développer. 

Dans le même mouvement, elle a mis l’accent sur la formation professionnelle et académique pour répondre aux demandes de l’entreprise. Et d’insister sur le facteur humain comme l’une des raisons essentielles pour lesquelles les entreprises continuent d’investir en Tunisie. Elle a rappelé également le travail qu’accomplissent ses services pour fluidifier les procédures et faire gagner du temps aux entreprises. Parallèlement, Madame Neila Nouira Gongi a attiré l’attention de tous les participants sur la nécessité de prendre en compte, dès aujourd’hui, les normes de demain : « Ce qui fait peur, ce sont les nouveaux paradigmes comme la nouvelle taxe carbone et nous serons confrontés comme exportateurs à notre empreinte carbone, et à notre conformité aux lois internationales. Il nous faut nous préparer à ces nouvelles lois qui arrivent et les prendre en compte dès aujourd’hui. Nous devons également intégrer les développements du digital pour lequel nous avons établi un programme concret, dont l’intelligence artificielle et le 4.0 constituent des parties importantes. Nous sommes conscients des difficultés et de l’urgence des changements que nous mettons en œuvre, mais la Tunisie comme terre d’accueil des partenariats de demain l’exige. » et de citer le super challenge du mix énergétique qui doit passer de 3,7 % à 35 % en 2035 ! »

De l’inspiration
et de l’expérience

Après avoir présenté le crédit impôt recherche, la baisse des impôts pour l’attractivité et l’exemple français pour soutenir la R&D dans son pays, Yazid Safir, directeur de l’Agence Française et de Développement en Tunisie, a rappelé que la Tunisie était un pays où l’AFD développait toutes les catégories d’aide et d’investissement, et a évoqué le fait que le gouvernement tunisien était dans une démarche de vérité. 

Madame la ministre de l’Industrie a entendu les propos et rappelé qu’on parlait d’expériences réussies dont il fallait s’inspirer. Aujourd’hui, « notre stratégie comprend des crédits recherche en se positionnant sur des partenariats industriels réussis ». Elle a ajouté : « beaucoup d’industries se sont implantées en Tunisie pour la production et sont restées pour aller vers les centres de recherche R&D. Le Crédit Recherche aidera les entreprises à booster leur activité en basant leurs centres à côté de leur production »

One Tech, Lamia Fourati 

Le FIT a donné la parole à de nombreux acteurs du développement dont Lamia Fourati, directrice générale de la stratégie de la société One Tech, qui a commencé à mettre en évidence la prédominance du secteur automobile avec ses 280 entreprises, ses 3 milliards d’euros à l’export, ses 100 000 emplois et sa participation à hauteur de 14 % des exportations nationales. Lamia Fourati a mis l’accent sur une nécessité pour la Tunisie « celle de ne pas rater le tournant important de l’automobile. Entre la connectivité, l’électrification etc.  l’automobile a connu en 5 ans plus de développement dans l’innovation que dans les 50 années qui ont précédé. Les entreprises de l’automobile cherchent une sortie à l’innovation, il ne faut pas les laisser aller ailleurs. Nous assistons à une réorganisation de la supply chain parce que le Covid a mis en évidence les risques liés à une trop forte dépendance à la Chine et à ses prix bas pour la supply chain. Cela a abouti à une nouvelle donne des européens qui ont mis en place l’European Chips Act qui permet de dire que tous les investissements en composants électroniques seront subventionnés. » – 

« La loi européenne sur les puces électroniques renforcera la compétitivité et la résilience de l’Europe dans le domaine des technologies et des applications des semi-conducteurs, et contribuera à la réalisation de la transition numérique et écologique. Elle y parviendra en renforçant le leadership technologique de l’Europe dans ce domaine. Avec l’Acte sur les puces européennes, l’UE va s’attaquer aux pénuries de semi-conducteurs et renforcer le leadership technologique de l’Europe. Elle mobilisera plus de 43 milliards d’euros d’investissements publics et privés et définira des mesures pour se préparer, anticiper et réagir rapidement à toute perturbation future de la chaîne d’approvisionnement, en collaboration avec les États membres et nos partenaires internationaux. » lit-on sur le site officiel de l’Acte – (ndlr)

Reprenant l’opportunité de cet European Chips Act, Lamia Fourati a souligné que « la partie tunisienne de la région pourra capter un flux de business; il s’agit donc pour la Tunisie d’énormes potentiels à saisir. Nous avons un avantage compétitif certain via les ressources humaines du haut en bas de la chaîne, de l’opérateur au manager, en passant par le middle manager. J’aime à rappeler qu’en Tunisie les managers sont tunisiens, ce qui est loin d’être le cas dans de nombreux pays de la grande région. Nous disposons d’une vraie industrie en Tunisie, d’une culture industrielle, d’une adaptabilité aux évolutions depuis 1972, profitons-en ! On voit se profiler l’innovation via les starts up, ce qui n’est pas un propos en l’air, puisque la Tunisie s’est affirmée comme le premier pays africain en termes d’innovation en Afrique. Ce qui représente de précieuses invitations à la création de nouvelles entreprises et à l’investissement. C’est l’un des rares pays sous-traitants où les entreprises automobiles n’hésitent pas à installer leurs centres de R&D, c’est extrêmement important. » 

One Tech, fournisseur de technologie 

Pour illustrer la capacité de croissance des entreprises en technologie, Lamia Fourati a pris comme exemple le Groupe qu’elle connaît bien, One Tech. « One Tech est un groupe industriel spécialisé dans l’électronique et la mécatronique qui emploie 4 500 personnes dont 50 % de femmes, et génère 350 millions d’euros de chiffre d’affaires à l’export. 40 ans d’existence lui ont permis d’acquérir les compétences les plus recherchées, c’est pourquoi One Tech fournit en composants électroniques – aux standards internationaux – de grands noms de l’équipement comme Valeo ou Bosch. Cependant, One Tech a décidé de passer de sous-traitant à fournisseur de solutions et s’est rapproché d’une entreprise de développement en hard et soft ware. On pourra ainsi fournir des solutions intelligentes, des solutions propres au secteur automobile. Fournisseurs de technologie, One Tech entend dépasser le rôle de sous-traitant de l’automobile – même de très haut niveau – pour devenir un vrai acteur sur le marché. Nous avons besoin de soutien pour aller plus loin dans l’internationalisation, et faciliter notre progression, nous sommes déjà au Maroc et livrons une cinquantaine de pays. Nos ambitions sont importantes ! »

Zied Guiga, Vice-Président de Wallys Car

Autre exemple de réussite industrielle s’appuyant sur la volonté et la compétence, Wallys Car est un peu un emblème de la Tunisie. L’audace des débutants, et le chemin parcouru sont autant de signaux que – dans un pays qui n’est pas la siège d’un grand constructeur automobile mondial, on peut créer de la valeur et sortir ses propres voitures. En attestent les propos de Zied Guiga, invité par la Fipa : « A 25 ans, j’ai rencontré un constructeur automobile, qui s’appelait René Bosch (à ne pas confondre avec Robert Bosch, équipementier allemand, ndlr), âgé de 75 ans qui m’a appris qu’on pouvait entrer dans l’industrie par l’artisanat ». Un message très fort et très emblématique de la Tunisie telle qu’elle est perçue à l’international. Il ajoute : « nous avons fabriqué un véhicule tunisien, avec 45 % d’intégration locale. Aujourd’hui, avec 100 personnes, nous avons conçu plusieurs modèles et nous disposons d’une capacité de production de 500 véhicules. Cependant, nous ne voulons pas rester dans notre « petite île », Wallys Car doit générer de l’argent pour continuer à se développer. Ce qui nous manque, nous n’hésitons pas à le dire, c’est que l’on n’encourage pas des commandes publiques qui nous permettraient de nous développer, car il nous faut bénéficier d’une perspective de stabilité réelle pour convaincre de nouveaux investisseurs. Il nous semble que le cadre législatif actuel ne permet pas de développer la construction automobile de véhicules particuliers. Il n’y a d’incitations que sur les VU, mais pas sur les VP. » Ce à quoi Madame la Ministre de l’Industrie a répondu qu’elle était consciente de la nécessité de faire évoluer les textes réglementaires et qu’ils y travaillaient au gouvernement ». 

ACTIA, incubateur pour les start-ups ! 

Illustration parfaite d’un partenariat entre deux pays, d’une organisation industrielle s’appuyant sur deux grands piliers en France et en Tunisie, Actia fait autant partie du paysage industriel français que de celui de la Tunisie. En effet, lorsque la production s’associe à la recherche et au développement au sein même d’un autre pays que le sien, la frontière entre les deux entités se révèle fort ténue. Walid Rouis, General Manager at ACTIA Engineering Services en Tunisie, a juste donné quelques chiffres en préambule qui sont plus parlants qu’un grand discours : « Nous avons créé notre premier centre de Recherche et Développement en 2005 en Tunisie avec 5 ingénieurs. Aujourd’hui, ils sont 650 ingénieurs à travailler aux développements d’Actia en Tunisie. On compte à peu près les effectifs en trois tiers de 1 500 collaborateurs en Tunisie, en France et dans les 14 pays où Actia est présent. » Rappelons qu’Actia, équipementier de rang 1 est arrivé en Tunisie avec une unité de produits électroniques qui sort 5 millions de de systèmes produits par an.

Là encore, le développent passe par l’innovation comme le commente Walid Rouis en évoquant la transformation digitale que nous vivons tous en ce moment : « La partie logicielle est majoritaire dans cette partie. C’est pourquoi, nous avons encore étoffé nos équipes et recruté 180 ingénieurs au cours du premier semestre à SFAX. Nous sommes en train de donner une autre dimension à Actia en élaborant un écosystème entre laboratoires de recherche, centres de recherche et de développement, start-ups…Nous avons beaucoup appris dans notre histoire et, surtout, nous savons combien il est difficile pour une start-up de venir une entreprise puis un groupe. La maturité vient au bout de 15 ou 20 ans ! C’est pourquoi, chez Actia, nous nous sommes dits qu’il fallait devenir plus contributeurs à l’Eco-système dans une démarche RSE, puisque nous sommes quand même le plus grand bureau d’études spécialisées en Tunisie. Le résultat de ces constats se traduit par la création d’un incubateur pour soutenir les produits des start-ups. Nous avons créé tout un système par nous-mêmes que l’on met à disposition des start-ups dont 6 sont déjà dans leur première année. » Les ressources sont là, et les grandes entreprises aident les sociétés débutantes à prendre leur envol, c’est aussi cela l’idée que voulait transmettre les invités au Forum Investment Tunisia. Hervé Daigueperce

Hervé Daigueperce
Hervé Daiguepercehttps://www.rechange-tunisie.com
Rédacteur en chef d'Algérie Rechange, de Rechange Maroc, de Tunisie Rechange et de Rechange Maghreb.

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