« Le SAV porte le service commercial »

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Rencontrer, le directeur général de City Cars s’apparente à une leçon de choses, simple et clairvoyante, où l’on découvre l’environnement de l’automobile et de la mobilité comme si on le voyait pour la première fois. Cet ingénieur formé à la prestigieuse École nationale supérieure d’Arts et Métiers de Paris exprime clairement les contraintes du monde d’aujourd’hui et les transforme en opportunités, en leviers de changement constructif. Verbatim.

Reconnaître la vraie place de l’Après-vente

« Depuis le début de ma carrière, j’ai eu la chance d’exercer plusieurs postes de responsable dans le secteur de l’automobile et j’ai pu constater qu’en Tunisie, malheureusement, l’Après-vente automobile restait généralement secondaire. Cela ne m’a pas empêché de travailler à son développement pendant plusieurs années, bien au contraire. A mon sens, le SAV porte le service commercial car il ne peut y de ventes de véhicules sans un SAV performant. Un SAV qui, aujourd’hui, est sanctionné immédiatement par les réseaux sociaux. Cette évolution du SAV est à l’image du changement climatique. En effet, la transition énergétique s’impose comme une symbolique vers les nouvelles technologies et de nouveaux services. Où le service devient primordial. La notion de service avec les réseaux sociaux devient une unité de mesure immédiate. Pour moi, il n’y a pas de frontière entre vente et après-vente si ce n’est sur un plan fonctionnel et il faut que les managers le comprennent bien, surtout en Tunisie où la raréfaction des véhicules va rendre la tâche des vendeurs beaucoup plus difficile. »

Entre besoins du marché et balance commerciale, la dure réalité des quotas

« En Tunisie, nous sommes confrontés à la problématique des quotas qui sont fixés en fonction de la balance commerciale et non en fonction des demandes du marché, ce qui réduit le nombre de véhicules à environ 50 000 par an. Sur le marché officiel. Mais combien en existe-t-il sur le marché parallèle ? Cela pose de multiples problèmes, ne serait-ce que dans la prévision en approvisionnements en pièces détachées. En tant que concessionnaire, nous lissons le marché, nous connaissons nos demandes en pièces, mais si on n’a pas accès aux véhicules, nos prévisionnels ne peuvent pas être d’une grande utilité. Il y a beaucoup de choses à faire dans notre pays et si le marché était libéré, on pourrait prétendre dépasser les à 70 000 véhicules par an. » 

De la formation comme viatique pour les nouvelles énergies

« Du côté des constructeurs, tout le monde est bien conscient que la transition énergétique ne pourra pas se faire sans la formation des techniciens. Nous avons, dans nos concessions, et plus largement dans le pays, les matières grises capables de suivre les évolutions techniques. Reste à former nos équipes. C’est pourquoi, nous avons la chance de faire faire des formations à l’étranger, chez le constructeur selon des process très élaborés. Tout cela revient à plus de service et il faut en être bien conscient du côté du siège de Kia Tunisie comme du côté du réseau. »

Le véhicule d’occasion, une opportunité ?

« Chez Kia, nous n’avons pas encore abordé la question du VO pour des questions structurelles. Tant qu’il y aura une demande supérieure à l’offre, il sera très difficile aux concessionnaires de s’imposer sur ce marché qui s’avère plus difficile qu’on ne le croit. Il me semble, en effet, que c’est un marché aussi capitalistique que celui des VN, mais de surcroit plus difficile à appréhender, parce qu’il n’est pas régi par des règles comme celui du VN. En VN, un pourcentage linéaire est affecté à la vente du véhicule, il n’y a pas 36 solutions. Le VO est bien plus complexe d’autant qu’il est majoritairement aux mains de l’informel actuellement. Pour aborder le VO, il nous faut entrer dans une nouvelle démarche qui nécessite beaucoup de prudence, car elle s’inscrit dans un nouveau paradigme qui comprend toutes les activités d’une concession, la vente du VN, du VO, la pièce, le SAV, la remise en état, etc. En définitive, le SAV constitue indéniablement la porte d’entrée de ce domaine.

Lorsqu’on est dans un marché fermé, nous ne voyons pas toutes les composantes. Notre business model doit changer et c’est la transition énergétique qui va nous y aider. Pour l’heure, nous sommes très bien placés chez Kia, car City Cars a enlevé la première place en 2019 et en 2020 et nos produits sont très convoités à la revente. 

Speedy, une nouvelle aventure ?

« Speedy est une structure autonome qui fait partie du Groupe. Nous avons commencé avec plusieurs centres Speedy sur Tunis mais ceux-ci ne réussissaient pas à atteindre la rentabilité que nous souhaitions, ni à trouver une vraie place sur le marché. Nous avons donc investi de l’argent pour renouveler le modèle complètement. C’est ainsi que nous avons orienté le business vers, entre autres, la vente de pièces détachées pour que les centres soient définitivement rentables. C’est une décision qui a été prise au sein du comité de Groupe et qui confère à l’après-vente une réelle importance, surtout, en l’occurrence, pour Speedy. L’idée étant de développer la distribution de la pièce de rechange dans tout le pays, Speedy ayant toute latitude pour acheter et distribuer la pièce du constructeur comme celle de l’équipementier de qualité d’origine. Et les premiers résultats sont plutôt prometteurs. En découle une plus grande synergie entre les sociétés du groupe et une meilleure productivité et rentabilité pour l’ensemble. »

AST, Auto Service Tunisie

« Chez AST, nom de l’entité de Speedy, nous avons créé une ligne directrice Après-vente qui pourra constituer un socle pour la formation des membres du groupe, pour les développements des services après-vente en général, pour la distribution des pièces, des équipements et des accessoires. Nous voyons dans ces centres également les relais dont vont avoir besoin les véhicules électriques et bien sûr les nôtres, en les équipant de bornes de recharge. Il va de soi que nous ne pouvons pas développer des bornes de recharge pour tous les véhicules dans les concessions Kia ou Honda (appartenant au Groupe), ce sont donc les centres Speedy qui proposeront ce service au consommateur final multimarque. »

Du service et de l’image

« Il est possible de gagner de l’argent avec le service mais à condition d’apporter plus que l’heure de main d’œuvre. Il faut que les centres soient synonymes de réponses aux besoins en pièces en plus de l’entretien -réparation mécanique. Il faut aussi que les prix correspondent à la demande. C’est pourquoi, AST a pour mission d’importer des pièces plutôt que de les acheter aux distributeurs locaux avec des marges brutes plus au moins confortables. Par ailleurs, il nous a fallu redéfinir le positionnement de la marque autour de prestations définies et claires, pour que le client identifie l’offre Speedy immédiatement. Ce que nous avons fait et Speedy est redevenue profitable, un résultat qui conforte les choix que nous avons pris. » 

De la stratégie d’un leader 

« City Cars est cotée en bourse et cette position confère à la société un rôle important dans son environnement proche et à l’extérieur. Quand on vient chez City Cars, c’est aussi pour profiter de son expertise et de ses développements. Dans les groupes, il y a souvent une société locomotive et City Cars joue ce rôle, et parce qu’elle génère, entre autres, du cash-flow, et on attend d’elle qu’elle investisse dans le développement. J’ajouterais, en aparté, qu’il faut également savoir vendre les véhicules, mais Kia est une marque de qualité à un prix compatible avec le marché. Ce sont des véhicules de très bonne conception avec un design attractif, appartenant à un groupe agressif dans le bon sens du terme, sur tous les marchés du monde. A nous de faire valoir ces atouts et de construire de nouveaux projets. Nous avons encore des zones de progrès, des projets de développement, une clientèle jeune à séduire davantage encore.

Par ailleurs, nous avons la chance de pouvoir proposer désormais le véhicule utilitaire. Il manquait à City Cars et nous l’avons depuis trois mois, depuis que nous avons reçu les SKD qui nous permettent de faire faire le montage des camionnettes KIA K 2500 en motorisation Diesel. (Précision : pour les simples cabines, simple pont, le véhicule doit être monté localement). Ce type de véhicule est très prisé dans notre pays et dans toute l’Afrique où il en entre dans les 5 000 unités. Là encore, grâce à la notion de synergies cet utilitaire va nous permettre de rentrer dans le centre du pays grâce à des agents. 

La garantie, un atout majeur ?

« La garantie naît de la fiabilité et non l’inverse. Si nous pouvons donner 5 ans de garantie, c’est parce que les véhicules sont très fiables. Ce n’est pas la garantie de 5 ans qui s’avère l’argument de vente principal, c’est sa réputation de fiabilité et de qualité. Par ailleurs, il faut se méfier des a priori. Il est, en effet, souvent dit que le marché tunisien est un marché de prix, pourtant sur la Kia Rio, du segment B, ce sont les versions les plus chères de ce modèle qui sont plébiscitées ! Comment l’explique-t-on ? C’est un véritable cas d’école. En clair, c’est la profondeur d’analyse qui nous permet de comprendre la demande du client et non le produit en soi. »

Kia une marque de conquête ?

« Kia a connu et connaît un véritable succès en Europe et si une marque réussit en Europe, elle réussira en Tunisie pour les petites cylindrées (notamment essence). Nous avons calqué sur le marché européen : même culture, même cylindrées, même image, mêmes homologations, etc. En outre le constructeur est très à l’écoute : si nous avons besoin de boîtes automatiques sur les VP, le constructeur les fabriquera et on sait que la BVA est l’avenir en Tunisie. De la même façon, l’électrification est en route, en VE ou hybrides. Cela prendra du temps, peut-être, mais de toutes les façons, l’électrification se fera. C’est pourquoi, nous sommes passés à l’offensive tout de suite avec le Niro. Importer tout de suite, anticiper, c’est se prémunir. Cela nécessite d’animer les équipes autour des défis qui se présentent. Je demande d’ailleurs à mes subordonnés de proposer de nouveaux projets et de nouvelles technologies, c’est motivant et stimulant pour l’ensemble des équipes. Cela demande beaucoup de travail mais notre équipe est pleinement opérationnelle pour répondre ! »

Propos recueillis par Hervé Daigueperce

Hervé Daigueperce
Hervé Daiguepercehttps://www.rechange-tunisie.com
Rédacteur en chef d'Algérie Rechange, de Rechange Maroc, de Tunisie Rechange et de Rechange Maghreb.

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